Longtemps, j’ai considéré la géographie comme une discipline qui aurait naturellement sa place parmi les sciences exactes. Avec ses déclinaisons : géodésie, géologie, hydrologique, géomorphologique, hydromorphologique, océanographique, etc., elle fournit des éléments fiables pour mesurer des distance, des reliefs, réaliser des cartes, localiser des lieux, prévoir des facteurs de risque.
Puis, j’ai découvert la géographie humaine en rencontrant quelques-uns de ses spécialistes. Initialement, je n’ai pas saisi la différence entre la géographie physique et sa déclinaison humaine, ce n’est qu’avec le recul que des interrogations se sont fait jour.
Ces experts effectuaient une étude sur les réactions des populations face au risque d’inondations, particulièrement en aval de grands barrages, ces derniers produisant une fausse impression de sécurité. Leur but était de « faire découvrir l’histoire des crues de la Vézère, tant aux résidents permanents qu’aux non-résidents, pour participer de la culture du risque ».
Ne voir que ce que l’on cherche
Tout occupés à leur mission de protéger les riverains du danger d’être sous la menace des barrages, nos géographes sont passés à côté de deux éléments. Je vous laisse juger de leur importance :
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en référence à l’inondation de 1960 dans la vallée de la Vézère, ils se sont intéressés uniquement à la Vézère, négligeant son affluent la Corrèze, qui avait pourtant fourni l’essentiel de la crue (c’est largement documenté) ;
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alors que je signalais un piège à crue, ils n’y ont prêté qu’une attention discrète, pourtant ce sujet devra un jour être étudié.
Nos géographes sociaux ont simplement ignoré les données physiques, objectives, pour donner la priorité à un concept, la dangerosité de vivre sous les barrages. Certes, les barrages présentent un danger, encore faut-il faire le bilan des risques et des vertus. J’en ai parlé ici.
Mais ce n’est pas tout, quand je leur ai signalé une grave, bien qu’ancienne erreur de conception d’aménagement d’une commune qui entrainait mécaniquement une aggravation des inondations, donc l’objet de leur recherche, ils n’ont réagi que par un sourire. Le sujet leur semblait secondaire, anecdotique. Je l’expose ici.
Qu’est-ce que la géographie ?
Étymologiquement, géographie peut se traduire en « écriture de la Terre », mais à la fin du XIXe siècle, la géographie se pense comme science de synthèse associant l’analyse physique et humaine, aïe ! Puis, dans la seconde moitié du XXe siècle, la géographie abandonne la tentation encyclopédique pour accepter l’idée que les questionnements scientifiques répondent à une « demande sociale », une approche de plus en plus « constructiviste ».
En interaction avec les autres sciences sociales, la géographie intègre à la tentative d’explication des faits sociaux, en intégrant l’idée que ceux-ci ne sont pas un donné, mais un construit des sociétés intégrant une dimension largement politique, mais aussi culturelle ; l’une des spécificités de la géographie est de penser l’espace. Bref, afin d’étendre largement son domaine d’intervention, la géographie quitte joyeusement la rigueur scientifique pour rejoindre les approximations des « sciences humaines et sociales. »
Voir la définition de cette discipline sur le site Géoconfluence.
Pourquoi ne pas dissocier le domaine géographique en « géographie physique » et « Sciences humaines géographiques » ?
À moins que celle que l’on nommait précédemment « géographie physique » est-elle désormais plus proche de la « géologie » ?